Novembre 2018. Immeubles effondrés, rue d’Aubagne. Noailles. Marseille. Huit vies ensevelies. Peut-être d’autres encore, enfouies à jamais sous les décombres. Les services de secours assurent que non. Scènes de tremblement de terre sans tremblement de terre.
Centaines de sinistrés. Ceux qui peuvent revenir chez eux mais ne veulent pas. Ceux qui n’y sont plus autorisés. Et ceux qui ne le pourront plus jamais. Leurs maisons « déconstruites », disent les autorités. Réduites en poudre. Par précaution. Une vie engloutie. Souvenirs, livres, lettres, photos, meubles, vaisselle, bijoux, vêtements, brosses à dents. Tout dévoré par la pelleteuse, la pelle tueuse.
On n’oubliera jamais. Immense balafre sur la gueule de la ville. Pendant longtemps, cette cicatrice de vide béant, géant. Notre ville meurtrie, abîmée, brisée, cassée. Détruite. Résultat d’une stratégie politique. Le pourrissement. Mairie murée dans son mépris. Les responsables devront être jugés, punis, à la mesure du drame qu’ils ont sciemment laissé couver.
Marseille, capitale de la misère, hurlait quelqu’un. Marseille, capitale de la colère. La douleur. Les pleurs. La peine. La rage. Trop. Au-delà de trop. Un voile épais de larmes s’est posé sur la ville. Il ne passe pas.
Non, ce n’est pas la pluie. Le 5 novembre, jour du drame, la mairie avait pourtant osé affirmer que les récentes intempéries pourraient en être la cause. Déni glaçant de cynisme et de mépris. Une semaine après la catastrophe, un vent de révolte se lève et l’exigence de justice s’impose.
Jan-Cyril Salemi
Novembre 2018
Photo : J.C.S.