N’importe quoi (épisode 1)

1 – Préambule
Ce voyage initiatique a eu lieu entre décembre 2004 et février 2006.
Dans le récit que j’en fais, récit truffé de mots inventés au mépris de toute décence envers les dinosaures de l’académie française, j’ai glissé des textes philosophiques, chansonniers, voire pire… Véritables fruits de mes entrailles, ces textes vous feront voir la vie en rose fesse, ils provoqueront l’émerveillement (ou la contraction) de vos orifices les plus vils, ils détruiront vos derniers neurones. Bref, ça vous en ouvrira un coin.

2 – Vestibule
J’ai longtemps hésité, dans une perplexitude esseulée, quant au titre à infliger à ces lignes folles, un titre vendeur mais sans mensonge. C’était pas gagné…
Lyrique, j’ai d’abord exsudé : Récit coupe-chou au ras des Bellis Perennis.
Puis, culinaire, j’ai régurgité : Succédané de daube et son dégoulis d’abattis.
Enfin, sobre et grave (XPTDR !), j’ai écrit : Voyage d’une cloche, mais Pâques.
Post scriptumement, je me suis dit que c’était n’importe quoi, et là, j’ai senti que je tenais mon titre !

3 – La connerie
– « C’est bizarre, tu vois, mais moi, je n’arrive pas à m’imaginer vieux.
– Ben t’as de la chance, parce moi, non seulement je m’imagine vieux, mais en plus je me sens vieux. Et pour corser le tout, j’ai bossé dans une maison de retraite et je peux te dire que c’est pas drôle de se retrouver seul comme un moins que rien parce que tes gosses sont trop occupés pour te faire une place chez eux et que du coup t’attends juste de crever et…
– Ça va, ça va, t’énerve pas ! Nous on sera des vieux super cool, on continuera de se bourrer la gueule et à rigoler comme des imbéciles.
– Ah tiens, en parlant de ça, elle est où la bouteille ?
– Dans ta main droite, eh cono ! »

D’un geste violent, je ramène la main en question vers moi pour vérifier les dires de mon ami, mais la bouteille, sans doute réveillée en sursaut et mécontente, tente de s’échapper et se brise sur la roche. Bizarrement, au même moment, ma main se met à saigner abondamment, et mon ami à gesticuler tout aussi abondamment tout en tentant la position verticale. Il tient absolument à se rendre à l’hôpital, ce qui me semble vraiment idiot vu que l’alcool est imbuvable là-bas, mais enfin, c’est mon pote… alors on se met en branle.
Les rues de Marseille étant très floues ce soir là, il nous faut plus d’une heure pour rejoindre la Timone à partir de Malmousque. Mais on rigole, ça c’est bien.
L’hôpital de la Timone est la moins drôle des discothèques de Marseille, qu’on se le dise. Et puis les videurs sont bizarres, ils ne laissent entrer que les types complètement défoncés ! J’en ai profité pour faire soigner ma main et finalement on est rentré dormir au Panier parce qu’on était refroidis.

4 – Une merde se lève
Je me réveille vers 15 heures. Je reste dans mon lit un bon moment, comme à l’accoutumée, à me faire le conte de ma néante de vie.
Pour me détendre, il faut que je picole. Pour sortir avec une fille, il faut qu’elle soit folle de moi et qu’elle fasse tout le boulot. M’intéresser à quelque chose plus de 10 minutes, c’est au-dessus de mes forces. Il faut toujours que je découpe les cheveux en 8 et demi. Je suis jamais comptant… Bref, je suis une merde, une qu’arrive même pas à se jeter dans la cuvette d’un chiotte pour en finir avec cette existence qui lui ressemble.

J’ai une vie à la Gainsbourg, sauf que j’arrive tout juste à écrire des chansons cacamenberkdiques dans lesquelles il y a Candy qui aime bien le petit prince des collines et vice et versa mais le petit prince d’où je viens de dire il est pas clair dans sa tête et donc ça finit toujours dans des plaines platoniques onanistiques à faire biodégrader un préservatif.

Alors heureusement, j’ai un boulot intéressant qui consiste à aider des gens à s’insérer dans la société… Et puis ça me permet d’avoir des collègues de bureau, des gars et des garces orthonormaux qui me font (censuré) avec leurs projets cloniques. Y va peut être changer sa voiture mais il est pas sûr, y va faire un crédit pour acheter la maisonnette avec presque 40 m2 de jardinet et dans la foulée il réajuste toutes ses opinions de gauche pour se sentir cohérent avec lui même, y s’est acheté un nouveau portable qu’il est tout beau, il a fait pipi que 2 fois hier mais le docteur il a dit que c’était pas grave…

Bref, je me tirerais bien (conditionnel lointain) à l’autre bout du monde, moi. Pas vous ?

5 – Retirer un tour du monde au distributeur
Je sors de chez moi vers 20 heures pour aller retirer 10 euros histoire de faire 3 courses. J’ai la tête dans le cul et ça me donne un drôle d’air… J’avance comme un fantôme dans les rues du Panier éclairées en jaune sale. Le distributeur de La Poste me renvoie ma carte sitôt insérée, sans mot dire (encore heureux d’ailleurs) Mince ! Il va falloir que je fasse 500 mètres de plus jusqu’au prochain !

Mais je regarde l’écran, ma carte bleue et jaune avec des soupçons de doré à la main, et il y a quelque chose qui cloche : le distributeur me demande quelle somme je veux retirer…

Je sais pas vraiment, j’hésite, euh, voyons, alors 10 euros pour les courses, et puis disons 2400 euros (j’ai vu ça sur Internet) pour un billet tour du monde, bon et puis c’est tout je crois. Je tape 2410, je valide, et l’argent sort en billets de 20 euros, plus un dernier de 10, ça prend plusieurs minutes … C’est Noël !!!

Mais Noël n’est pas fini. Machine (j’ignorais son prénom) me redemande combien je veux retirer. Je suis pas saoul mais je choisis un chiffre bien rond, 3 000, pour mes frais de voyage, j’envoie, ça sort en billets de 100, j’arrache, je pars en courant pour le cas ou Machine serait équipée d’un bras télescopique rattrapeur de profiteur de bug, je m’enferme chez moi, j’ai oublié de faire les courses mais je m’en fiche de manger, je pose les billets sur le lit, je les compte, 5410 euros, je rigole bizarrement tel un psychopathe devant un plat de spaghetti rouge…

Je vais me tirer (futur proche) à l’autre bout du monde, moi. Mais pas vous.

(à suivre)