N’importe quoi (épisode 5)

14 – The pêcheur
(Histoire entièrement véridique…)

Aujourd’hui, à Poindimié, je suis seul pour l’après midi. Les autres sont partis sur un îlot du coin et comme j’ai mal au dos, je reste tranquille.
Je décide de pêcher pour la première fois de ma vie, parce que j’habite Marseille, alors, faut pas déconner, je dois apprendre.

Me voila donc au bord de l’eau avec ma canne à pêche, déterminé. Les premiers lancers échouent, l’hameçon finissant sur mes habits. Enfin, d’un geste fulgurant, un peu comme Goldorak quand il lançait son poing, à l’époque, je propulse ma ligne à deux mètres de moi. J’attends 20 minutes puis je trouve le silence bizarre alors je tire. Ça résiste terriblement. En fait j’ai sûrement fait une prise fantastique, au moins un thon de 50 kilos, qui devait faire le mort pour me feinter.
Mais à moi, on ne la fait pas !
Je tire comme un malade, puis comme un âne et enfin comme un fou. Aucun de nous n’y arrive. Décidément, ce thon doit peser 100 kilos, ce qui m’étonne à peine car j’ai toujours pensé que j’étais, au fond de moi, un pêcheur exceptionnel.
Comme l’eau est assez transparente, je finis pas comprendre. Ma prise pèse environ 4,5 tonnes, il s’agit d’un beau rocher…

Je remonte à la maison chercher mon masque pour aller décrocher cet imbécile d’hameçon, et quand je redescends… il y a un poisson au bout de ma ligne !!
En fait il a dû croquer l’appât et du coup décoincer l’hameçon. Quelle chance j’ai ! Je suis tombé sur un des descendants de ces quelques rares familles de poissons que les essais nucléaires français passés n’ont pas rendu plus intelligents1.

Modestement fier de moi, je rentre. Mais une fois arrivé, je me demande comment procéder. J’ai bien essayé d’enlever l’hameçon de sa bouche mais ça résiste, et comme j’ai un peur de lui faire mal, j’hésite.
J’ai soudain une superbe idée. Je remplis d’eau une bassine dans laquelle je rajoute un peu de sel pour faire comme la mer, puis j’y installe mon poisson (d’environ 12 centimètres de long, tout de même) avec l’hameçon toujours accroché, donc.
Et puis j’attends le retour des autres, tel le pêcheur un peu las après sa pêche. Le poisson à l’air de moins en moins en forme mais c’est sans doute juste un coup de blues.

Eh bien figurez vous que mes amis ont osé se moquer de moi, à leur retour, soit disant qu’il fallait juste tirer fort sur l’hameçon puisque de toute façon le poisson n’allait pas s’en remettre, et soit disant que le sel de cuisine avec de l’eau du robinet, c’était une idée complètement loufoque.

Et donc je pêcherai plus jamais, et voilà.

15 – Histoire de voile (intérieur)
(Merci d’être assez aimable pour voir le second degré contenu dans ce texte)

C’est la faute des femmes si je suis un écorché vif, je le sens comme une évidence scientifique. Par exemple, j’en vois une dans la rue que je trouve attirante – c’est parfois son regard, sa démarche, ses gestes, son sourire – alors je la regarde, bouche ouverte comme dans la tente du bonheur, puis elle disparaît, toujours brutalement, sauvagement, et chaque fois un morceau de moi est arraché. C’est terrible.

Pourquoi font-elles cela ? Elles le savent bien, forcément, quand je les regarde comme ça, que je les trouve belles à coller, et qu’en s’en allant ainsi elles vont m’arracher un morceau d’émoi, que je vais être encore un peu plus écorché, si bien qu’à force j’en deviens tout sanguinolent et que je laisse des traces sur le sol quand je marche et que tout le monde me repère et que c’est dégueulasse cette traçabilité, bordel !
Mais elles s’en curent les ongles.
Ne pourraient-elles pas venir vers moi, me dire qu’elles m’aiment, que j’ai l’air mignon, ou bien encore me faire un petit bisou sur la joue, et ainsi me permettre de garder l’espoir qu’elles soient toutes infirmières ou disons au moins toutes à mon service ?

Parfois, j’aurais envie de leur crier : « Je ne suis pas un plant de maïs transgénique, ne m’arrachez pas ! », mais je doute qu’elles puissent comprendre… De toute façon les femmes ne comprennent rien, c’est évident, quand on y pense de façon adéquate et… mâle.
Et surtout elles sont cruelles. Elles maternent leurs enfants sans doute par pure obligation século-génétique, mais elles s’en fichent sobrement de moi, car elles ne sont pas altruistes pour un saoul ni envers moi d’ailleurs ; c’est bien connu de ceux qui sont au courant.

De toute façon, j’ai compris que ma seule chance, c’était l’automédication. J’irai donc me coller avec une femme attachante, et je porterai un voile pour ne pas regarder toutes les autres, puisque leur attitude impitoyable m’y oblige !

(à suivre)

1J’ai complexifié volontairement cette phrase lourde d’ironie afin que vous puissiez vérifier par vous-mêmes si le nuage de Tchernobyl ne vous aurait pas un peu amoindri…