Enjeux olympiques

Les JO approchent. Avec leur cortège de nuisances et quelques litres de peinture « verte » pour faire bonne mesure. Deux lycéens analysent la situation.

Mobilisation organisée par le collectif No-JO à Marseille © Oscar Hagel

À moins de six mois des Jeux Olympiques, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, annonçait mardi 5 mars que la jauge de spectateurs prévue pour la cérémonie d’ouverture serait abaissée à 320 000 personnes. Un peu plus de deux ans plus tôt, optimistes, les organisateurs en prévoyaient 2 millions. Cette déclaration s’inscrit dans une série d’annonces et promesses non tenues qui ont marqué le projet Paris 2024 et participé à un désenchantement global progressif à l’égard du « plus grand événement jamais organisé en France ».

Des collectifs d’opposition se sont peu à peu rassemblés pour dénoncer les incohérences de cette olympiade, mais aussi de la récente candidature des Alpes françaises pour les JO d’hiver en 2030. Les problématiques remarquées sont majoritairement situées sur les plans sociaux et environnementaux, qui sont pourtant des arguments phares de l’organisation.

Paris 2024 en inéquation avec les objectifs climatiques affichés

En avril 2021, le Comité International Olympique (CIO) révélait un agenda de cinq ans d’engagement pour le climat en énonçant notamment la volonté de faire des Jeux Olympiques de Paris les premiers avec un impact positif sur le climat. Cette ambition s’est révélée être trop présomptueuse, puisque les objectifs sont désormais de réduire par deux les émissions de gaz à effet de serre (GES) par rapport aux précédentes éditions. Les « Jeux verts » prônés ne seront par ailleurs pas seulement décevants dans leur empreinte carbone selon les collectifs d’opposition tels que Saccage 2024 et No-JO. Entre l’épreuve de surf à 15 000 km de Paris, sur la plage de l’île de Tahiti, la tour pour les juges de cette même épreuve construite en perçant des récifs coralliens alors qu’une autre existe déjà, ou encore la destruction partielle de jardins partagés à Aubervilliers pour un projet de construction d’une piscine olympique et d’un solarium finalement avorté, les décisions prises font débat et suscitent la colère des habitants locaux.

Ces groupes de citoyens ont ainsi mis en lumière les différences entre les discours en faveur de l’écologie prononcés par les organisateurs des Jeux Olympiques et les actions effectuées.

Des Jeux marqués par d’importantes problématiques sociales

Un autre aspect de Paris 2024 qui divise repose sur sa dimension sociale. Plusieurs mesures prises par le CIO et les autres organisateurs comme Anne Hidalgo, maire de Paris, et Tony Estanguet, président de ces Jeux, apparaissent en effet en contradiction avec les « Jeux accessibles et populaires » clamés par ces derniers. Certaines ont déjà fait le tour des réseaux sociaux comme l’expulsion d’étudiants de leur logement CROUS pour accueillir le personnel de l’événement, ou encore la hausse exorbitante du tarif des tickets de métro pendant la période alors qu’ils étaient initialement annoncés comme devant être gratuits pour les détenteurs de billets des épreuves. Mais d’autres restent inconnues du grand public, moins médiatisées. C’est le cas de l’emploi illégal d’ouvriers sans papiers sur les chantiers des Jeux par exemple.

Si on se réfère aux dernières éditions des Jeux Olympiques, comme les organisateurs ont aimé le faire afin de mettre en avant des progrès, on remarque que les problèmes sont souvent du même ordre. Ainsi, les populations les plus précaires sont déplacées : à Paris les personnes sans domicile fixe seront expulsées de la ville pendant les Jeux, ce qui rappelle le « nettoyage des favelas » de Rio pour la coupe du monde de football 2014 et les JO 2016. Autre constante des dernières olympiades, des mesures de sécurité seront effectives à Paris sous la forme de drones de télésurveillance passant par la reconnaissance faciale. La « Loi Sécurité Globale », dont il est ici question, est décrite comme « intrusive et attentatoire aux libertés » par le collectif Saccage 2024 et participe au mécontentement d’une partie du peuple français quant à l’organisation de ces JO.

Photographie prise dans le métro parisien témoignant de l’impact des JO sur les populations locales © Oscar Hagel

Alpes françaises en 2030, une candidature qui fait débat

Le mardi 7 novembre 2023, le Comité National Olympique et Paralympique et les présidents des régions Auvergne-Rhône-Alpes (Laurent Wauquiez) et Sud PACA (Renaud Muselier) officialisaient la candidature des Alpes françaises pour accueillir les Jeux dhiver 2030. Quelques semaines plus tard, cette candidature était la seule retenue par le CIO. À linstar des JOP d’été de Paris 2024, des détracteurs se sont rapidement mobilisés en demandant notamment un référendum citoyen pour que le projet soit décidé démocratiquement. Selon ceux-ci, lorganisation de Jeux Olympiques dans les Alpes telle quelle est pour linstant prévue est critiquable sur de nombreux points. 

Dabord, un événement dune telle ampleur émet de fortes quantités de gaz à effet de serre (en partie à cause du tourisme de masse) alors que les effets du dérèglement climatique se font désormais sentir dans les montagnes françaises. Son organisation dans les Alpes risque donc daccentuer le recul des glaciers et interroge.

Dun point de vue économique, alors que le gouvernement multiplie les mesures de restriction budgétaire sur les services publics, accueillir les Jeux Olympiques pose ici un problème de cohérence. De la même manière que les Jeux d’été, l’olympiade hivernale est assez onéreuse puisquelle requiert entre autres de la neige artificielle, chère et nécessitant dimportantes quantités d’énergie et d’eau.

Un autre point soulevé par les collectifs dopposition est la création de nouvelles infrastructures, pour certaines probablement non utilisées après les Jeux, sachant que dautres existent déjà. Cest le cas de la patinoire olympique qui devrait vraisemblablement être construite à Nice alors que dautres de taille suffisante sont fonctionnelles à Marseille et Grenoble. 

Lorganisation de ces Jeux n’étant pas (réellement) attribuée, le projet Alpes 2030 pourrait cependant encore évoluer pour limiter limpact environnemental quil engendrerait.

Des solutions envisageables ?

Ainsi, des incohérences ont été soulignées dans les projets olympiques de Paris 2024 et Alpes 2030 par des citoyens et collectifs dopposition. Dès lors, la question de potentielles solutions émerge. Évoquée plus tôt, lorganisation dun référendum citoyen pourrait en être une car elle refléterait lopinion publique. Le peuple français pourrait alors donner ou non son accord pour la réalisation du projet tel quil est imaginé par ses organisateurs.

Enfin, un des plus gros impacts sur les populations locales étant le tourisme, organiser des Jeux Olympiques de plus petite ampleur permettrait un allégement de la pression touristique et une diminution de la pollution de lair causée par les déplacements. Afin de limiter ceux-ci, une partie des places pour assister à l’événement pourrait être réservée aux locaux, ce qui amplifierait probablement leur engouement pour les Jeux Olympiques et Paralympiques.

Oscar Hagel & Nataël Guillaume
Mars 2024


Cet article a été conçu par deux élèves du lycée Saint-Charles à Marseille. Il s’inscrit dans le cadre d’un atelier journalisme animé par des membres de l’équipe de Qui Vive (Gaëlle Cloarec et Jan-Cyril Salemi) pendant l’année scolaire 2023-2024.